Jean-Guy
Harvey
Préface au
recueil d'illustrations RICOCHET (1983) de Pierre D. Lacroix
Je
connais Pierre depuis quelques années déjà. Certes, nous ne
nous sommes jamais rencontrés. Cependant, je connais bien
l'artiste Pierre D. Lacroix car j'ai accumulé, au cours de
ces années, plusieurs de ses oeuvres.
J'ai
présentement sous les yeux le contenu des portefolios TRANSIT
(en collaboration avec Mario Giguère) qui date de 1980 et
son tout dernier, FEMMES DE REVES (1983). Je les ai choisis
car ils sont représentatifs du travail de Pierre.
Nous
constatons qu'un même thème, qu'une même obsession hante toujours
Pierre : la femme. C'est la femme idéalisée dans sa beauté
et solitaire. Cette belle femme dont le profil ou le faciès
se découpe sur fond d'espace sidéral, comme dans tant de ses
oeuvres et qui semble étrangère, indifférente à ce qui l'entoure.
Elle est la femme-sphinx de TRANSIT: immuable, souveraine,
régnant sur le temps et l'espace. Elle est aussi celle au
regard lointain, indéfinissable de "Regard" dans
le portefolio FEMMES
DE REVES.
C'est
aussi la femme que hantent les animaux. Particulièrement le
chat. Cet animal domine la femme de Lacroix. Chat immense,
tel le dieu Baal, qui un moment dans l'oeuvre de l'artiste
remplit tout l'espace sidéral qui sert de toile de fond. Chat
énigmatique qui, dans "Chat-peau" du portefolio
FEMMES DE REVES, semble hypnotiser la femme.
Il
arrive même que la femme de Lacroix ne fasse qu'un avec l'animal.
Elle se transforme en louve-garou.
Les
monstres sont souvent présents dans son oeuvre. L'on devrait
plutôt dire les démons monstrueux qui cernent la femme sans
l'attaquer. Présents dans la réalité éveillée comme dans celle
du rêve.
L'homme
dans l'oeuvre de Lacroix? Eh bien, il y est fort peu présent.
Il est lointain, chasseur solitaire. Rarement d'origine terrienne,
souvent représenté sous la forme d'une créature extraterrestre
plutôt hideuse. Il est associé très souvent à la mort.
L'homme
est aussi associé aux sorciers, aux démons, quand il n'est
pas le démon lui-même. Sorcier qui déchaîne la mer ou domine
la Terre, la femme, comme dans LES EXILÉS DU CHRONOSCAPHE
(recueil d'illustrations, collectif, publié par les Editions
du Bureau, Québec).
Il
est enfin, comme dans "Absence", dans FEMMES DE
REVES, cet animal-homme, prêtre énigmatique et peu rassurant
de quelle religion satanique? La femme lui tourne le dos.
Vient-elle de l'apercevoir ou le fuit-elle?
Est-il
besoin de souligner que l'oeuvre de Pierre est influencée
tant par l'univers de la science-fiction que celui du fantastique?
Surtout du fantastique?
Cet
univers inquiétant, angoissant, c'est ce qui me plaît dans
son oeuvre.
Jean-Guy Harvey,
collectionneur
Trois-Pistoles, Qc, juillet 1983
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